Franck Michel

Éditions GOPE, 234 pages, 14.5x20.5 cm, 58 illustrations noir et blanc + cahier photos couleur 16 pages, 1975 , ISBN 979-10-91328-30-2

lundi 4 avril 2016

Cultures d'Indonésie

Peti Futé Mag - Printemps 2016


Ce recueil de chroniques culturelles sur l’archipel Indonésien nous emmène d'île en île, d’une religion à une autre, d’une société à une autre. « L’unité dans la diversité » est d’ailleurs le slogan de cet immense pays de tous les possibles. Ces chroniques sont surtout des invitations à voyager au fil de l’Archipel, de ses cultures et de ses territoires, insulaires, volcaniques, urbains.


De la culture sasak au culte de la nature à Lombok (extrait)

Chroniques d'Indonésie

Lombok est résolument une île qui se mérite. Une grande île qu’il ne faut surtout pas amalgamer aux trois petites îles Gili… même si ces îlots touristiques appartiennent de fait à Lombok.

En réalité, les sous et l’esprit de Bali dominent ce petit monde insulaire de la fête organisée et du farniente obligé. Lombok relève d’une réalité autrement plus exotique. Comparée à Bali, on perçoit tout de suite qu’on y trouve encore des espaces quasi vierges ! Et notamment des plages immaculées qui n’ont absolument rien à envier aux rivales balinaises, bondées ou blindées, parfois polluées et de plus en plus privatisées. Mais le constat est là : les touristes défilent massivement à Bali et boudent durablement Lombok.

Une nature plus intacte qu’à Bali ?

Lombok est une île nettement moins peuplée et bien plus intacte sur le plan de l’environnement que Bali, son orgueilleuse mais célébrissime rivale.

Terriblement concurrencée par sa voisine balinaise, sa terre est plus rude (moins convoitée ?), ses habitants ont opté pour un islam globalement orthodoxe délaissant peu à peu un islam aux relents animistes longtemps ancré dans la tradition locale, et, la pauvreté aidant, les principaux rouages de l’économie insulaire sont aux mains des Balinais sinon des Javanais et des étrangers. Au fil du temps, l’amertume et la rancœur s’ajoutent ainsi à la fierté redoutable et à la foi inébranlable des habitants de Lombok. Mais ces raisons de la colère sont compréhensibles, car l’histoire de l’île, à l’instar de son sol souvent ingrat, n’a pas été facile à vivre, à digérer, à supporter.

Aujourd’hui, en fait depuis au moins deux décennies, l’histoire semble se répéter à propos du développement touristique : à sa voisine, plus sexy, médiatique et hindoue, les recettes et devises, et les restes, s’il y en a, reviennent aux habitants de Lombok. De là – et de quelques regrettables faits divers relatant régulièrement les déboires de trekkeurs occidentaux se confrontant à l’ascension du Rinjani – provient sans doute aussi cette mauvaise réputation des habitants de l’île dès lors qu’ils viennent s’installer dans l’Est balinais ou dans les bas-fonds de Denpasar ou de Kuta, en quête d’un travail illusoire ou d’une échappatoire à la misère.


vendredi 25 mars 2016

Coutume, religion et politique chez les Toraja à Sulawesi-Sud (extrait)

Chroniques d'Indonésie

En Indonésie orientale, les Toraja Sa’dan résident essentiellement dans le département (kabupaten) qui porte leur nom (Tana Toraja, également contracté en Tator, ce qui signifie « Terre des Toraja ») et qui se situe dans la province de Sulawesi-Sud. La colonisation hollandaise s’est imposée tardivement (1905-1907) dans cette région montagneuse, isolée et difficile d’accès. Mais l’évangélisation connut un succès, certes lent, mais durable, en partie due à la présence de puissants voisins musulmans. Si les conflits interconfessionnels furent nombreux, le syncrétisme religieux constitue aujourd’hui une réalité quotidienne, rassemblant notamment les chrétiens (protestants, catholiques, pentecôtistes…), les musulmans et les derniers pratiquants des cultes autochtones.

Le rapide essor du tourisme a ébranlé les valeurs et les habitudes des villageois. Il a aussi permis aux habitants de gérer alternativement leur futur, leurs politique et économie locales, ainsi que d’affirmer leur identité culturelle. Les croyances religieuses autochtones exigent un investissement considérable et relèvent d’un mode de vie et de pensée en lien étroit avec la « voie des ancêtres ».

La majorité des Toraja sont aujourd’hui chrétiens mais, en dépit des conversions et des changements socioculturels irrémédiables – notamment ceux conférés par l’ingérence de l’État indonésien, de la mondialisation et du tourisme international dans les affaires locales – qu’ils connaissent depuis quelques décennies, les faits culturels et religieux continuent d’occuper un rôle essentiel comme le montrent par exemple les cérémonies funéraires traditionnelles. Le monde des Toraja se divise en deux sphères distinctes ainsi que les ont fixées conjointement la coutume (ada’ ou adat) et la religion (aluk ou agama) :

1
L’Est
Le matin
Les rites propitiatoires
(Rambu Tuka’)

2
L’Ouest
Le soir
Les rites funéraires
(Rambu Solo’)

Les fêtes toraja attirent et fascinent les touristes autant que les autoch-tones. La mise en tourisme de la société n’occulte pas encore la ritualisation du spectacle de la mort […]



Les îles Banda, un archipel aux épices rudement convoitées (extrait)

Chroniques d'Indonésie

On connaît la route de la Soie ou celle des Indes, mais on a quelque peu oublié la route des Épices. Certes, elle est historiquement pavée d’embûches et surtout de sang et de larmes. À nos yeux, elle paraît également bien lointaine, dans le temps (XVIIe siècle) comme dans l’espace (13 000 km).

Le chemin très prisé pour parvenir à ces épices exotiques (notamment clous de girofle et noix de muscade) méritait peut-être une bataille, mais pas autant de guerres, passées et présentes, car l’histoire si douloureuse de la double conquête, à la fois économique et coloniale, de ce modeste archipel est tout sauf un long fleuve tranquille. Alors qu’en Amérique du Sud, à la même époque, le métal jaune et ses promesses justifiaient aux yeux de beaucoup d’Européens le mythe de l’Eldorado, en Insulinde l’or portait le nom d’épices exotiques, rares, précieuses, valant par conséquent leur pesant d’or sur le marché de cette première mondialisation en pleine gestation depuis l’avènement – et aussi le massacre organisé – desdites « Grandes découvertes ». Grandes, car très lucratives surtout. Les Moluques et leurs épices n’échappent en rien à cette triste réalité et dure loi du marché.

Les îles indonésiennes sont un peu à l’image des poupées russes : ainsi, si les Moluques représentent un modeste archipel oriental au sein de l’immense archipel Indonésien, le minuscule archipel de Banda n’est quant à lui qu’une petite composante de l’archipel des Moluques. En fait, les îles Banda (au nombre de 10, mais seules 7 îles sont habitées) occupent le sud du district appelé « Moluques du Centre » qui se trouve dans la province officiellement dénommée « Moluques » (formant avec la province de « Moluques du Nord », l’ensemble de l’archipel des Moluques). La richesse de cet archipel tient en un mot : la muscade.


mardi 8 mars 2016

Les nomades de la mer (extrait)

Chroniques d'Indonésie

En Insulinde, les nomades de la mer écument les derniers recoins maritimes de l’archipel Indonésien, mais aussi Malais et Philippin. Ils portent divers noms, mais Orang Laut, ou « gens de la mer » en indonésien et en malais, est l’appellation générique (comme pour le terme de sea gypsies en anglais). La plupart du temps, on les nomme Badjo ou encore Bajau, en fonction surtout des lieux et des territoires maritimes qu’ils fréquentent.
Si leur mode de vie reste en partie nomade, il est résolument en sursis et menacé de disparition, et cela est déjà le cas en maints endroits de l’Archipel, au nombre de quelques centaines ou de quelques milliers (les données chiffrées peuvent varier considérablement en fonction des critères adoptés). Cette population authentiquement nomade s’est réduite drastiquement au fil du temps. Leur survie passe en général par la sédentarisation, de gré comme de force, sous l’impulsion des autorités en place.
Les diverses composantes de gens de la mer naviguent, habitent chichement ou simplement survivent sur le littoral oriental de la grande île de Sumatra, dans les îles voisines et sur les côtes des îles de Bangka et de Belitung. Ils sont également présents aux abords de Bornéo, et surtout autour de Sulawesi – au Nord en particulier – et dans l’archipel des Moluques. Les liens avec les Bajau des Philippines semblent assez évidents tandis que ceux entretenus notamment avec les Moken de Thaïlande restent nimbés de mystère. Les traces historiques manquent cruellement, mais on sait que jadis, les Badjo parcouraient les mers, reliant certainement l’océan Indien au Pacifique Sud.


vendredi 26 février 2016

L’île de Komodo : dragons et lagons, tourisme et patrimoine (extrait)

Chroniques d'Indonésie
« Le meilleur qu’on puisse ramener de voyages, c’est soi-même, sain et sauf » professe très sagement un joli proverbe persan, criant de vérité sinon d’effroi. Un séjour au pays des dragons reste gravé dans les mémoires touristiques, car il projette le visiteur dans un autre temps, celui en vérité de l’angoisse sous contrôle et du trip organisé, bien plus que celui d’une préhistoire mythique vendue par les agences. Il reste qu’inconsciemment nombre de visiteurs gardent cette émotion et même cette sensation d’avoir échappé au pire : se faire engloutir tout cru au bout du monde par un varan géant, au mauvais moment, au mauvais endroit. Revenir « sain et sauf » de cette « expérience non ordinaire », pour reprendre le terme du sociologue John Urry, participe à ce simulacre au demeurant efficacement mis en scène, la patrimonialisation officielle du site n’ayant fait que renforcer une scénarisation bien huilée.

Le parc national de Komodo, du nom de la principale île où se trouvent les célèbres varans, est niché au cœur d’un ensemble d’îles joliment bordées de récifs coralliens sur lesquelles vivent plusieurs familles de pêcheurs musulmans, notamment des Makassar, des Bugis, des gens également venus de Sape ou de Bima sur l’île voisine de Sumbawa ou encore d’autres habitants de Florès voire de Sumba, sans oublier quelques Bajo, ces « gitans de la mer » démunis et oubliés qui survivent tant bien que mal dans l’Est de l’archipel Indonésien.
Les « dragons » de Komodo, comme on les appelle généralement, ne sont pas les derniers témoins de la préhistoire (même s’ils y ressemblent !), mais de très gros lézards et de lointains cousins qui hantent les origines de notre temps. Par contre, leur apparence, c’est-à-dire leur forte ressemblance avec les dinosaures qui ont occupé notre enfance bien plus encore que cette aire géographique, est flagrante et a largement forgé notre imaginaire. [...]


mardi 16 février 2016

En prévente jusque mi-mars !


Résumé

Ces chroniques sont autant d’invitations à voyager au fil de l’Archipel, de ses cultures et de ses populations. Voyager en Indonésie, c’est découvrir un autre espace-temps, un autre monde que le nôtre, des lieux magiques nourris de fortes traditions où les choses avancent parfois bien plus vite qu’en Occident. L’Indonésie nouvelle est en marche ; le pas reste incertain, mais le chemin prometteur.
Bienvenue dans un pays jeune au potentiel évident, une terre riche de traditions et de croyances impatiente de plonger au cœur de la mondialisation ! Un Archipel de tous les possibles, fabuleux, plein de paradoxes et de surprises, une mosaïque culturelle fruit d’un passé aussi riche que douloureux.

Abondamment illustré, ce livre pourra accompagner le voyageur féru d’ethnologie et soucieux d’une approche responsable du tourisme.


L'auteur

Nomade dans l’âme et libre comme l’air, Franck Michel est anthropologue et auteur d’une vingtaine d’ouvrages sur l’Asie et le voyage.  Ses terrains d’études se situent prioritairement en Asie du Sud-Est et notamment en Indonésie qu’il parcourt depuis bientôt trois décennies. 

Cofondateur de la plate-forme culturelle de partage La Croisée des Routes, il se consacre entièrement à l’écriture et au bon plaisir de vivre.



Histoire
Archéologie
Mythes
Géopolitique

Croyances
Animisme & chamanisme
Hindouisme & bouddhisme
Islam & christianisme

Culture
Fêtes
Rites
Arts

lundi 8 février 2016

Table des matières



PRÉSENTATION : L’ARCHIPEL DE TOUS LES POSSIBLES

1RE PARTIE
UN ARCHIPEL RICHE ET VASTE, L’UNITÉ DANS LA DIVERSITÉ
Regards croisés Orient-Occident
L’art et la manière de fumer en Indonésie : la kretek fait un tabac !
L’arôme éternel. Histoire et actualité du café en Indonésie
L’île de Komodo : dragons et lagons, patrimoine et tourisme
Les îles Banda, un archipel aux épices rudement convoitées
Les nomades de la mer
La modernité balinaise à l’épreuve

2E PARTIE
UN PATRIMOINE FASCINANT, UNE HISTOIRE ET UNE FOI SYNCRÉTIQUES
Candi Sukuh, un étrange temple à Java
Singaraja et le Nord méconnu de Bali
Bogor : son histoire, son jardin botanique
Borobudur, remarquable mandala géant de pierre
Les forts coloniaux dans les Moluques
La rencontre historico-religieuse entre Bali et Lombok
Coutume, religion et politique chez les Toraja à Sulawesi-Sud

3E PARTIE
UNE MULTITUDE DE PEUPLES, DE CULTURES ET DE CROYANCES
L’île de Nias au large de Sumatra : rites et mégalithes
Le fabuleux et pénible destin des Mentawaï de Siberut
Tourisme mondial et identité locale à Sumba :
(1) une culture en sursis ?
(2) les pasola dans l’Ouest de l’île
De la culture sasak au culte de la nature à Lombok
Entre ciel et terre : les chats sacrés en pays toraja
Ambon, le coeur ouvert des Moluques

CONCLUSION
L’INDONÉSIE FACE À SON DESTIN ET À SES DÉMONS

CAHIER PHOTOS